Roches et phénomènes ignés 3

3.  Le volcanisme

a) Introduction

On désigne par volcanisme l'ensemble des phénomènes liés à la montée et à l'épanchement sur la surface de la Terre de magmas. Ainsi que nous avons eu l'occasion de le signaler précédemment on désigne par magma les masses silicatées, partiellement ou totalement fondues, qui se trouvent dans ou sous la croûte terrestre et qui contiennent en solution des gaz (vapeur d'eau, CO2, H2S, HCl, H2, etc.).

Fontaine de lave pendant l'éruption du Kilauea (Hawaii)

b)  Activité volcanique

N'importe quelle activité volcanique, qu'elle soit paroxysmale ou d'intensité modérée, est due, directement ou indirectement, à la libération plus ou moins violente des gaz dissous dans le magma. La manière selon laquelle se manifeste la séparation de la phase gazeuse à partir de la phase fondue dépend avant tout de la viscosité du magma et, en plus, des conditions géologiques qui en déterminent l'ascension. Il faut tenir compte avant tout de la différence entre l'activité des magmas fluides et celle des magmas visqueux. En effet, dans les magmas fluides l'activité explosive est très réduite, car les gaz peuvent se séparer facilement du bain fondu, qui arrive en surface et flue en formant une coulée de lave. Dans les magmas visqueux, au contraire, la libération des gaz, rendue difficile par les phénomènes de frictions internes, se fait pour cette raison de manière explosive; le magma fondu est ainsi morcelé et même pulvérisé, projeté dans l'air et déposé sous forme de matériaux pyroclastiques.  Des recherches statistiques sur l'activité volcanique démontrent que les volcans qui ont une activité essentiellement effusive et ceux qui ont une activité explosive sont fréquents, tandis que ceux qui ont une activité mixte sont rares.

Pour comprendre le mécanisme fondamental de l'activité volcanique, il est nécessaire de comprendre la rivalité entre la pression interne, due aux tensions partielles des gaz dissous dans le magma, et la pression extérieure. A grande profondeur, la pression extérieure est égale à la somme de la pression hydrostatique de la colonne magmatique sus-jacente et de la résistance due à la viscosité du magma. Elle dépasse la tension de vapeur due aux gaz dissous dans le magma. Le magma, contenant les gaz dissous à l'état moléculaire et donc pourvu de bulles, prend le nom d'hypomagma. A des profondeurs plus faibles, la pression extérieure diminue et devient moins élevée que la tension de vapeur. Par conséquent, une partie des gaz, pour rétablir l'équilibre entre la pression extérieure et la pression intérieure, se libère sous forme de bulles. Le magma bulleux et parfois mousseux est appelé pyromagma.  Dans la partie la plus haute de la cheminée volcanique, presque tous les gaz se libèrent ; il reste le magma dégazé, appelé aussi épimagma, qui, s'il est suffisamment fluide, peut s'épancher et former une coulée.

1°  Activité continue

L'activité continue s'observe le plus clairement dans les volcans ayant un magma très fluide et un conduit ouvert. Elle consiste dans la libération de gaz qui s'effectue à intervalles réguliers à la surface de la colonne magmatique, avec de faibles explosions entraînant de petits morceaux de magmas.

La visibilité du phénomène externe dépend du niveau de la colonne magmatique dans la cheminée. Si le niveau du magma est à une profondeur telle que les petits morceaux de lave lancés en l'air par les explosions ne peuvent rejoindre la gueule du volcan, mais retombent dans la cheminée, le phénomène se réduit à l'émission à intervalles réguliers de bouffées de vapeur. Si le niveau du magma est beaucoup plus près de la gueule, les projections de lave se refroidissent et se consolident pendant leur trajectoire : on a alors des projections de scories non incandescentes qui retombent autour de la gueule. Enfin, si le niveau du magma a presque rejoint le fond du cratère, les morceaux de lave, encore liquides et incandescents, sont envoyés à quelques centaines de mètres de hauteur au-dessus du bord du cratère et donnent lieu à de spectaculaires fontaines de lave. Parfois, le magma peut déborder du cratère et former de petites coulées de lave très dégazées ou même s'infiltrer parmi les couches de scories du cône et réapparaître à une bouche plus ou moins éloignée du cratère.

Quelle que soit la variabilité des phénomènes visibles de l'extérieur, le mécanisme de l'activité continue reste pour l'essentiel le même. Dans une cheminée remplie de pyromagma, ce dernier se refroidit en surface et s'alourdit. Il en résulte une convexion thermique : le magma plus froid descend généralement le long des parois, et le plus chaud monte dans l'intérieur de la cheminée. Le pyromagma, en montant, se trouve à des pressions de plus en plus faibles; sa phase gazeuse se sépare donc sous forme de petites bulles. On a donc une convexion biphasée si efficace qu'elle maintient une activité constante. La perte de gaz en surface transforme le pyromagma mousseux en épigmama dégazé plus lourd, lequel, par un mouvement de convexion, va en profondeur; là il s'enrichit de nouveau en gaz par diffusion et se retransforme en pyromagma. Les grandes fluctuations de l'activité continue sont essentiellement dues à ces processus de dégazage-regazage, de refroidissement et de réchauffement.

Les bulles, pendant leur montée, augmentent de volume par suite de la diminution de pression et aussi parce qu'une nouvelle quantité de gaz leur est cédée par le magma. Par ailleurs, une bulle plus grande monte plus rapidement et englobe les autres bulles qui se trouvent sur son chemin. Elle s'agrandit et acquiert ainsi une vitesse beaucoup plus élevée que les autres bulles : ainsi se forment des trains de bulles avec une grosse bulle en tête. A son arrivée près de la surface, le train de bulles est gêné par une couche d'épimagma visqueux formé lors de la dernière explosion et non encore entraîné par la convexion biphasée. Lorsque la pression des bulles est plus élevée que la résistance et la tension superficielle de la couche d'épimagma, les bulles explosent violemment et lancent des morceaux de lave en l'air. Ces derniers retombent en partie dans la colonne magmatique et forment une couche d'épimagma qui gêne temporairement la libération du train de bulles suivant; c'est ainsi que l'on explique les intervalles plus ou moins longs entre les explosions.  Si l'épimagma, au lieu de descendre le long des parois de la cheminée, s'injecte dans un conduit latéral et arrive à la surface, on a une effusion lente subterminale, qui représente une autre forme d'activité continue. Le mécanisme des coulées subterminales s'explique de la manière suivante : quand le niveau du magma dans la cheminée est très haut, celui-ci exerce sur les parois une pression hydrostatique qui facilite sa pénétration dans les strates moins cohérentes du cône éruptif formé par l'accumulation de scories et fragments de lave plus ou moins soudés. Au fur et à mesure que le magma descend le long de la pente de la couche, la pression hydrostatique augmente à tel point qu'elle finit par vaincre la résistance du matériel sus-jacent. Il s'ouvre alors une gueule magmatique effusive, à partir de laquelle le magma, déjà dégazé dans le cratère, flue en formant une coulée, alimentée plus ou moins en fonction du niveau atteint par le magma dans la cheminée.

La libération des gaz se fait aussi, dans ce cas, dans le cratère en haut de la colonne magmatique, tandis qu'à la bouche subterminale on n'observe aucune libération violente de gaz.

Une autre variété d'activité continue des magmas très fluides est la formation d'un lac de lave dans le cratère. C'est le cas du Kilauea (Hawaii) et du Niragongo (Congo) où la surface de la colonne magmatique s'est élevée jusqu'au cratère. La libération des gaz, dans un lac de lave, se fait de manière plutôt tranquille, non seulement parce que la surface de lac est suffisamment vaste, mais aussi parce que les réactions exothermiques entre les gaz volcaniques et l'oxygène atmosphérique provoquent une augmentation de la température, d'où une diminution de la viscosité du magma.

Dans tous les cas, l'activité continue est due à une fluctuation concernant l'équilibre dynamique entre la pression extérieure et la pression interne qui peut durer aussi longtemps que des phénomènes extérieurs ne viennent pas la troubler.

Si le mécanisme de l'activité continue dans les volcans à magmas visqueux est fondamentalement semblable à celui des magmas fluides, la phénoménologie en est par contre différente. En effet, la viscosité élevée du magma n'a pas empêché seulement la libération des gaz, qui s'effectue alors de manière explosive et très violente; elle provoque aussi un énorme ralentissement des mouvements de convexion et des éventuels épanchements à la surface. De ce fait, la cheminée ne peut rester, comme dans le cas des magmas fluides, continuellement ouverte, mais doit être ouverte une nouvelle fois à chaque explosion. Il en résulte qu'il ne peut se produire d'émission de scories ou de petits morceaux de lave, ni d'épanchements lents subterminaux. L'activité continue se manifeste ici par la formation dans le cratère d'un bouchon. Avec l'accroissement de ce bouchon, la couche superficielle déjà consolidée se brise en plusieurs morceaux roulant le long de la pente et s'accumulant tout autour du dôme. Parfois, le magma situé à l'intérieur du dôme atteint la surface, le long des cassures, et forme des coulées réduites qui accroissent le dôme. Si la viscosité du magma est très élevée, des colonnes de magma presque solide sont injectées vers le haut de la cheminée. Un exemple classique est celui de l'« Aiguille » de la montagne Pelée à la Martinique qui atteignit 350 m de haut.1

La croissance des dômes peut se poursuivre avec des fluctuations pendant des années; elle est parfois accompagnée de phénomènes explosifs qui peuvent prendre un caractère catastrophique si la pression des gaz à l'intérieur du conduit est très élevée. C'est dans des conditions analogues que prennent naissance les nuées ardentes, qui sont des suspensions incandescentes de particules solides et partiellement fondues dans la masse gazeuse très mobile. La nuée ardente est si lourde qu'elle dévale le flanc du volcan à une vitesse très élevée et détruit tout ce qu'elle rencontre sur son chemin. Un exemple classique de ce phénomène est la catastrophe de 1902, où une nuée ardente, descendue de la montagne Pelée, détruisit la ville de Saint-Pierre avec ses 29 000 habitants.

2°  Les éruptions à conduit ouvert

Les éruptions de ce type s'observent uniquement dans les volcans ayant une lave très fluide, par suite de la rupture de l'équilibre dynamique qui existe pendant l'activité continue. Pour rompre cet équilibre, il est nécessaire de faire varier de manière brusque soit la tension interne des gaz, soit la pression hydrostatique. Un changement brusque de la tension des gaz doit être exclu, alors que cela est très possible pour la pression hydrostatique. Pour qu'une éruption se produise, il suffit qu'une fissure s'ouvre en profondeur : le magma qui s'y injecte provoque un abaissement de la colonne magmatique dans la cheminée. La diminution de la pression hydrostatique qui en découle a pour conséquence une rapide transformation de l'hypomagma en pyromagma mousseux, lequel se traduit par une éruption terminale si la fracture rejoint la surface, ou latérale si une fracture radiale arrive sur le flanc du cône volcanique.

Représentation schématique des mécanismes éruptifs à cheminée ouverte.

1.      Activité continue : viscosité peu élevée; peu de H. Dans P, convexion biphasée, le niveau d'explosion (x-x) est près de la surface. Episodiquement, par explosion de trains de bulles, on a injection de débris de lave.

2.      Eruption de cendres : viscosité moyenne; le niveau d'explosion (x-x) s'abaisse progressivement dans le conduit pendant l'éruption; rapide transformation de H en P; dans la cheminée qui agit comme un canon, l'expansion continue des gaz accélère le mouvement ascendant des cendres qui sont éjectées très haut.

3.      Eruption ignimbritique : viscosité très élevée; grande quantité de H; P devient une mousse (foam lava); le niveau d'explosion (x-x) est à la surface; l'expansion des gaz s'effectue en dehors de la cheminée et dans toutes les directions; la lourde suspension s'étale latéralement (nuée ardente débordante).

 

• Les éruptions « terminales »

Les éruptions terminales de magmas fluides constituent une réaction violente à la brusque chute de la colonne magmatique, à la suite de l'ouverture en profondeur d'une fissure qui n'atteint pas la surface. L'intensité de l'éruption terminale dépend de l'ampleur de la fracture et de la rapidité de son ouverture. La quantité d'hypomagma qui se transforme en pyromagma éruptible est proportionnelle à ces deux facteurs. La phénoménologie d'une éruption terminale peu violente est la suivante : un peu avant l'éruption, et par suite de l'abaissement de la colonne magmatique, le phénomène d'activité continue se réduit à l'émission de vapeur à partir de la cheminée centrale. Souvent, le matériel incohérent du cratère s'éboule et bouche la cheminée ; on a alors l'impression que le volcan est inactif. Le magma plus profond, saturé en gaz, devient sursaturé et commence à mousser. L'éruption débute par une forte explosion qui vide la cheminée du matériel éboulé précédemment; puis suivent des émissions de scories et de petites quantités de lave, qui augmentent au fur et à mesure jusqu'à former une fontaine de lave, laquelle alterne avec l'émission de coulées de laves. L'intensité de cette activité diminue progressivement avec des fluctuations, jusqu'au moment où tout le pyromagma est dégazé. Après une éruption semblable, vient une période de repos. Un exemple d'éruption terminale est celle qu'a connue l'Etna le 4 juillet 1964.

Si l'éruption terminale est très violente, les gaz qui se dégagent brisent et pulvérisent le magma; au lieu d'assister à des fontaines de lave, on observe des émissions de cendres, qui peuvent atteindre plusieurs kilomètres de haut et, transportées par le vent, se déposer à des centaines de kilomètres du lieu d'émission. L'éruption du Vésuve en 1944 en est un très bon exemple.

• Les éruptions latérales

Les éruptions des magmas fluides de ce type sont précédées par des secousses sismiques locales dues à la formation de fractures radiales en profondeur qui s'ouvrent par à-coups et se propagent jusqu'aux flancs du volcan. Le pyromagma de la cheminée pénètre immédiatement dans la fissure et favorise son ouverture jusqu'à la surface. Les violentes explosions qui suivent lancent en l'air la brèche d'ouverture, puis des scories et des petits morceaux de lave qui s'accumulent le long de la fissure et constituent de petits cônes adventifs alignés. Tandis que par les gueules plus hautes se libèrent des gaz chargés de particules solides et fondues, par les parties plus basses de la fracture s'échappent de puissantes coulées de lave de magma partiellement dégazé. Il en résulte une diminution de la pression hydrostatique et un abaissement de la colonne magmatique dans la cheminée centrale. Une grande quantité d'hypomagma se transforme en pyromagma qui laisse échapper, de manière très violente, une importante quantité de gaz, entraînant ainsi une éruption de cendres à partir du cratère central. Les épanchements de lave à partir des cratères latéraux et les éruptions de cendres du cratère central peuvent se répéter plusieurs fois. Après cette phase, le volcan rentre en période de repos. Le Vésuve, en 1906, et l'Etna, en 1892 et 1928, ont eu des éruptions latérales classiques. Si le magma est très visqueux, les laves ne peuvent s'épancher par les fractures latérales et les éruptions ne peuvent pas s'effectuer selon un processus analogue à celui que nous venons de décrire.

Représentation schématique des éruptions à conduit ouvert.  1.  Eruption terminale, 2.  Eruption subterminale, 3.  Eruption latérale, 4.  Eruption excentrée

3°  Éruptions à conduit fermé

Les éruptions à cheminée fermée sont aussi appelées reprises d'éruptions car la réouverture de la cheminée s'effectue après une période de calme plus ou moins longue.

Nous avons déjà souligné que, pendant l'activité continue des magmas fluides, la manifestation visible de l'extérieur est réduite à une émission plus ou moins rythmée de vapeur si le niveau de la colonne magmatique se trouve très bas dans la cheminée. Dans un cas semblable, il peut arriver que les parois de la cheminée et du cratère s'éboulent et constituent un bouchon qui obture la cheminée. L'activité continue est alors arrêtée et remplacée par une légère activité fumerollienne. Le bouchon est imperméabilisé par l'altération chimique, par la fusion et l'infiltration de magma qui se solidifie et se soude par refroidissement. Au-dessous du bouchon, naturellement, la tension des gaz qui s'accumulent augmente jusqu'à vaincre sa résistance mécanique. Après une série de secousses sismiques prémonitoires, le bouchon est brisé et éjecté avec une violence très grande. Suivent des émissions de scories, de lambeaux de magma, puis de lapilli et de cendres jusqu'à la libération de l'excès de gaz. Après un arrêt plus ou moins long, l'activité continue reprend.

Un type particulier de reprise d'activité est désigné par le nom d'éruption plinienne. C'est le cas de l'éruption du Vésuve de l'an 79 qui détruisit les villes de Pompéi et d'Herculanum, provoquant la mort de Pline l'Ancien (d'où son nom).

Le caractère principal d'une telle éruption est la très longue période de calme qui la précède et pendant laquelle s'effectue une importante différenciation du magma. Après l'expulsion du bouchon, on assiste à une éruption très violente de ponces et de cendres qui, par différenciation, acquièrent une composition chimique changeant progressivement. Dans le cas des magmas visqueux, les reprises d'éruptions terminales sont fortement explosives. Avant l'éruption, la cheminée est bouchée par de la lave consolidée qui, au fur et à mesure, est réchauffée et refondue à sa base. Lorsque la tension des gaz dans le pyromagma dépasse la résistance mécanique du bouchon, ce dernier est brisé et éjecté. Les gaz chargés de ponces et de cendres sont émis jusqu'au moment où se rétablit l'équilibre entre la pression extérieure et la pression intérieure. Le volcan entre alors en période de calme. Des éruptions de ce type sont très fréquentes.

4°  Éruptions initiales

Par le terme d'éruption initiale, on désigne la naissance d'un nouveau volcan. Un très bel exemple de la naissance d'un volcan à magma très fluide est celle du Paricutin (Mexique) en 1943. Elle fut précédée par de violentes secousses sismiques locales et par le bombement du sol, au sommet duquel est apparue une fracture qui a émis, mélangé à des eaux souterraines, du matériel de la couverture. Suivirent des émissions de scories qui s'accumulèrent autour de la fissure et édifièrent un cône. Plusieurs émissions de lave se produisirent successivement.

Les éruptions périphériques, sur les flancs ou les parties basses du volcan actif à magma fluide, peuvent être considérées comme des éruptions initiales. De la même façon, une série de secousses sismiques locales provoque l'ouverture de fractures par lesquelles le magma fluide profond parvient à la surface. Les fractures, qui s'ouvrent de bas en haut, sont complètement indépendantes de la cheminée centrale. Cela est confirmé par le fait que l'activité de la cheminée centrale n'enregistre pas immédiatement l'éruption périphérique. Mais si l'émission de lave est importante au niveau des bouches périphériques, il se produira, en profondeur, une dépression dont l'effet sera ressenti après un temps plus ou moins long, même au niveau de la colonne magmatique centrale, qui s'abaissera. Parfois, la dépression sera suivie de l'effondrement de la partie sommitale du volcan. Le cas se produisit à l'Etna en 1669, où un petit cône volcanique se forma à partir duquel se déversèrent trois coulées dont l'une détruisit partiellement Catane.

Les éruptions initiales dans les cas des volcans à magma visqueux sont semblables dans leurs grandes lignes aux éruptions terminales explosives, avec la différence que la cheminée déjà existante ne se rouvre pas et qu'il s'en forme une nouvelle. Après des tremblements de terre précurseurs, l'éruption commence par la projection de brèches qui libèrent la cheminée, à partir de laquelle des explosions de plus en plus violentes envoient à plusieurs dizaines de kilomètres de haut des ponces et des cendres en grandes quantités. Après ce stade paroxysmal, on assiste à des périodes caractérisées par une activité décroissante avec émission de cendres jusqu'à extinction. Dans le cratère en forme d'entonnoir une activité fumerollienne peut persister pendant quelque temps; le plus souvent, le cratère est envahi par des eaux phréatiques : il se forme alors un petit lac, dit maar. Parfois dans le cratère, après une période de calme, un dôme se forme, à la suite d'une très lente émission de magma fortement dégazé.

Des éruptions initiales peuvent aussi avoir lieu en mer. Le mécanisme est le même que celui des éruptions subaériennes. En revanche, les phénomènes observés changent. Lorsque le magma vient au contact avec l'eau de la mer, on observe de très forts dégagements de vapeur qui traversent la surface marine et lancent en l'air des jets chargés de scories (noires) accompagnés de bouffées de vapeur (blanches). Les scories s'accumulent au fur et à mesure autour de la gueule sous-marine et constituent un cône qui peut s'élever au-dessus de la surface de la mer. Il en résulte que les éventuelles éruptions seront de type aérien.

5°  Volcanisme fissural

Dans ce cas, on peut parler aussi de la naissance de volcans qui, au lieu de se placer sur une ouverture centrale, sont localisés sur une fracture abyssale pouvant mesurer plusieurs dizaines de kilomètres. Après l'explosion des brèches d'ouverture, suivent des éjections de cendres et de scories et enfin des fontaines de lave, avec des épanchements de coulées qui peuvent couvrir de grandes surfaces. Vers la fin des grandes effusions, l'activité se réduit à l'éjection de scories, avec des petites coulées de lave, non plus le long de la fissure, mais à partir de chaque bouche.

Contrairement aux volcans à cheminée centrale, dont les nombreuses éruptions se suivent à intervalles réguliers toujours à partir du même évent, les éruptions fissurales ne se répètent presque jamais à partir de la même fissure qui est définitivement bouchée par la lave consolidée. L'éruption du Laki (Islande), en 1783, se fit, selon Thoroddsen, par une fracture dont la longueur avoisina 25 km; environ 12 km3 de lave furent émis qui couvrirent une surface de plus de 565 km2.

•  Éruptions fissurales sous-marines

Très fréquentes dans les fossés marins et océaniques, ces éruptions sont des émissions tranquilles sans phénomènes explosifs. En effet la pression hydrostatique élevée de la colonne d'eau empêche la formation de vapeur d'eau, tandis que les autres gaz volcaniques sont dissous par l'eau de mer. Si à la surface ces éruptions passent inaperçues, elles provoquent par exemple la rupture de câbles téléphoniques immergés. Les recherches géophysiques et surtout l'étude géologique des zones océaniques fossiles émergées mettent en évidence leur existence.

•  Éruptions fissurales ignimbritiques

Seuls les magmas visqueux peuvent donner des éruptions ignimbritiques. Il n'en existe pas d'observation directe, et leur allure est reconstituée par l'étude des produits émis. Des tremblements locaux précèdent l'ouverture d'une ou plusieurs fissures à partir desquelles, après l'émission des matériaux encaissants, s'échappent, avec des explosions violentes, des cendres et des ponces. Le pyromagma mousseux qui remplit la fissure présente, un peu avant de déborder, l'aspect d'un amas ponceux incomplètement rigide. Au fur et à mesure que la viscosité du magma augmente, les parois des bulles éclatent; ainsi, le pyromagma se transforme en une suspension d'esquilles de verre, de débris de ponces et de phénocristaux isolés dans une masse gazeuse incandescente. La suspension ainsi formée, du fait de la faible quantité de gaz éjectée par unité de temps et de surface, ne peut être envoyée en l'air et déborde de la fissure, d'où le nom de nuées ardentes débordantes. Sa mobilité est si forte qu'en un temps très bref elle se répand comme un fluide et couvre des surfaces très grandes. Pendant le dépôt des matériaux en suspension, la température est suffisante pour que les esquilles de verre et les ponces encore visqueuses soient, dans les parties inférieures et à l'intérieur du dépôt, écrasées et soudées à tel point que la roche qui en résulte ressemble à une coulée de lave. Vers le sommet et sur les bords de la formation, la roche, moins soudée, passe progressivement à un tuf cinéritique. Dans certains cas, à la fin de l'éruption, le magma dégazé monte le long de la fissure et forme, dans ou sur la couverture ignimbritique, des intrusions tardives. Le Monte Amiata, en Toscane, en est un exemple; on y rencontre en plus des rhéo-ignimbrites, c'est-à-dire des ignimbrites qui ont flué le long de terrains inclinés.

6°  L'activité fumerollienne

Les fumerolles sont des sources de vapeur et de gaz chauds. Dans les cratères et les fissures des volcans actifs, on trouve des fumerolles dont la température peut dépasser 1 000 °C et qui contiennent, en plus de la vapeur d'eau surchauffée, une quantité plus faible d'anhydride carbonique, d'acide chlorhydrique, d'hydrogène, de chlorures et de très petites quantités d'autres substances volatiles. Les sulfates sont prédominants dans les fumerolles dont la température est inférieure à 650 °C.

Dans toutes les régions volcaniques, les fumerolles dont la température varie entre 90 °C et 300 °C sont très fréquentes. On les désigne sous le nom de solfatares car elles contiennent, en plus de la vapeur d'eau, de l'hydrogène sulfuré, lequel, au contact de l'air, s'oxyde et dépose du soufre autour des évents. La solfatare de Pozzuoli en est un exemple classique.

Des fumerolles plus froides, caractérisées par des températures inférieures à 90 °C, prennent le nom de mofettes; elles produisent une grande quantité d'anhydride carbonique.

On trouve des fumerolles éphémères sur les coulées de lave en cours de refroidissement. Dans certains cas, elles déposent des sels ammoniacaux, qui proviennent de la distillation sèche de certaines substances végétales couvertes par les coulées.

Un type particulier de fumerolles est celui qui résulte de l'évaporation d'eaux phréatiques réchauffées par les plutons magmatiques existant en profondeur.

Fumerolle de la solfatare du Pozzuoli avec dépôts de soufre.

7°  L'activité hydrothermale

Cette activité consiste en une émission d'eau, dont la température élevée peut être liée à des phénomènes volcaniques, géothermiques ou provoqués par des réactions chimiques entre les eaux vadoses et les roches encaissantes.

Les geysers sont un type particulier de sources intermittentes localisées dans les régions volcaniques. Trois régions sont particulièrement riches en geysers : l'Islande, la Nouvelle-Zélande et le National Park de Yellowstone aux États-Unis. Le mécanisme de l'activité des geysers s'explique si l'on admet qu'une fissure remplie d'eau, à une certaine profondeur, reçoit des gaz volcaniques chauds et de la vapeur d'eau. Au fur et à mesure, ces derniers élèvent la température de la fissure jusqu'à l'ébullition qui correspond à la pression régnant dans cet endroit. L'eau bouillante expédie en l'air la colonne d'eau sus-jacente, qui forme ainsi le jet du geyser. Cela se traduit par une chute de la pression qui transforme l'eau surchauffée en vapeur. Le geyser le plus fameux est celui de Wainmangu en Nouvelle-Zélande. Il était capable de lancer en l'air une colonne de 800 000 kg d'eau et de pierres jusqu'à 460 m de hauteur. Son activité dura cinq années et cessa en 1904, lorsque le niveau du lac voisin (Tarawera) s'abaissa par suite de la rupture d'une digue naturelle.

Le Steamboat geyser au Yellowstone.

c) Les produits de l'activité volcanique

En fonction de leur état de consolidation, on distingue deux types de produits volcaniques : les laves et les produits pyroclastiques, aussi appelés téphras.

1°  Les laves

• Morphologie des laves

Les laves sont des amas compacts d'épimagma consolidé. Les formes superficielles des coulées de lave dépendent, en plus de la viscosité de l'épimagma, de leur mode d'écoulement. Les laves très chaudes et fluides forment très rapidement une croûte visqueuse qui, trouée par la coulée de lave sous-jacente, est plus ou moins déformée sans pour cela se briser. Ainsi prennent naissance différents types morphologiques, comme les laves cordées, les laves en boyaux et les laves lisses, qui sont dans leur ensemble regroupées par le terme hawaïen de laves pahoehoe. Si la croûte ainsi formée, et devenue suffisamment rigide, est soumise à des tensions provoquées par un mouvement accéléré de la lave sous-jacente encore liquide, elle se morcelle et forme une lave en dalles. Si, au contraire, l'écoulement de la coulée est ralenti, la croûte déjà solidifiée est poussée vers le haut et, en se cassant, elle forme des protubérances. Des coulées noires fluides, mais encore relativement riches en gaz, se recouvrent de scories découpées ou plus ou moins arrondies; on les désigne sous le nom hawaïen de lave aa. Les coulées très visqueuses présentent un aspect nettement différent : leurs surfaces sont recouvertes de blocs anguleux et non scoriacés. On les appelle laves à blocs. La partie interne des coulées et des dômes est formée par de la roche compacte, souvent traversée de fractures orientées normalement aux surfaces de refroidissement et provoquées par la contraction thermique. II en résulte la structure prismatique bien connue.

Très souvent, on peut observer dans les coulées une séparation parallèle à la surface, due à l'écoulement laminaire de la lave devenue déjà très visqueuse, ce qui lui confère un aspect stratifié.

La fameuse "Chaussée des Géants" du comté d'Antrim en Irlande du Nord, est un exemple typique de fissuration en colonnes dans une coulée basaltique.

• Structure des laves

La structure d'une roche qui résulte de la solidification d'une masse magmatique complètement fondue, dépend de la vitesse du refroidissement. En effet, si celui-ci est très lent, les cristaux ont le temps de se former; la roche qui en résulte sera donc complètement cristallisée et aura une structure holocristalline à grain fin. Si, au contraire, le refroidissement est très rapide, les cristaux n'auront pas le temps de se former, et la masse fondue se consolidera en une roche complètement vitreuse (obsidienne). Entre les deux types de structures, holo­cristalline et vitreuse, on rencontre des types intermédiaires, dans lesquels de très petits cristaux (microlites) sont disséminés dans une pâte vitreuse (mésostase) : ce sont les structures microlitiques.  Mais le magma commence souvent à cristalliser très lentement, en profondeur, avant l'effusion. Au moment de l'éruption, existent déjà des cristaux qui sont entraînés à la surface par la lave fondue. Ces cristaux intratelluriques, plus grands que ceux qui se forment pendant le refroidissement de la coulée, prennent le nom de phéno-cristaux. La masse fondue dans laquelle se trouvent les phénocristaux se consolide, en fonction de sa vitesse de refroidissement, en une pâte de fond vitreuse, micro­cristalline, ou holocristalline à grain fin. Toutes ces structures à phénocristaux sont appelées porphyriques. Si la masse de fond est vitreuse, la structure est vitro-phyrique.

•Composition minéralogique des laves

Les minéraux qui se séparent dans un magma en cours de refroidissement sont, pour la majeure partie, des silicates de différentes espèces. En fonction de leur teneur dans la roche, ils se divisent en minéraux essentiels, minéraux accessoires et minéraux accidentels. Les composants essentiels se divisent à leur tour en minéraux sialiques (Si, Al), très fréquemment incolores, et en minéraux fémiques (Fe, M g) colorés en vert, marron et noir.

La classification systématique des roches ignées se base sur les proportions de minéraux sialiques. Des subdivisions supplémentaires peuvent intervenir en fonction de la quantité globale de minéraux fémiques, exprimée en pourcentage par volume, appelée aussi I.C., ou indice de coloration. Les composants sialiques principaux (ou alumino-silicates) sont les feldspaths, les feldspathoïdes et le quartz. Les feldspaths sont les minéraux les plus abondants des roches ignées, dont ils forment en moyenne 60 %. Ce sont des alumino-silicates d'alcalins (Na et K) et de calcium formant des séries isomorphes, c'est-à-dire des cristaux à composition moyenne, entre les pôles : orthose Or ou feldspath potassique KAlSi3O8; albite Ab ou feldspath sodique NaAlSi3O8; anorthite An ou feldspath calcique CaAl2Si2O8.

La miscibilité entre ces trois minéraux n'est pas complète. On peut ainsi distinguer deux séries : a) les feldspaths alcalins ou sodipotassiques avec la sanidine et l'anorthose ; b) les feldspaths calco-sodiques ou série continue des plagioclases (Ab, An avec un peu d'Or).

Dans les roches ignées pauvres en silice (roches basiques), à côté des feldspaths apparaissent des alumino-silicates que l'on appelle feldspathoïdes. Les types les plus importants sont la leucite KAlSi2O6 et la néphéline NaAlSi04.

Dans les roches acides, si la quantité de SiO2 présente est supérieure à celle qui est nécessaire pour former des silicates saturés (f), il se forme du quartz SiO2.

Les minéraux fémiques ou ferromagnésiens les plus importants sont les pyroxènes, les amphiboles, la biotite, les olivines et les mélilites. Parmi les pyroxènes les plus importants, se trouvent les pyroxènes monocliniques, ou clinopyroxènes, où l'on distingue des espèces minéralogiques caractéristiques des différents magmas : augites, pigeonites, aegyrine-augites, titano-augites.

Chez les minéraux fémiques, on assiste également à la substitution d'un minéral par un autre, chimiquement très voisin, si dans le bain fondu la quantité de silice est peu élevée. Ainsi l'olivine (Mg, Fe)2 SiO4 remplace un pyroxène riche en SiO2.

Dans les roches volcaniques, assez rares, caractérisées par des teneurs élevées en calcium parallèlement à des teneurs déficitaires en silicium, apparaît la mélilite, mélange isomorphe de Ca2(Mg, Fe)Si207 et de NaCaAlSi2O7. Une quantité excédentaire de calcium en présence de CO2 aboutit à la formation de calcite (CaCO3).

Il faut remarquer que les formules chimiques que nous venons d'utiliser sont approximatives. En effet, outre les substitutions isomorphes indiquées, il en existe d'autres plus complexes, notamment dans le cas des clinopyroxènes.

Les minéraux signalés sont stables dans les roches volcaniques qui ont cristallisé à basse pression après effusion de la lave. Ils sont caractéristiques des roches volcaniques stricto sensu. Dans les faciès subvolcaniques, c'est-à-dire à des pressions plus élevées et en présence de nombreux gaz volcaniques, des minéraux intratelluriques se forment à leur place, et l'on retrouve ceux-ci sous forme de phénocristaux dans les roches volcaniques. Parmi les minéraux caractéristiques du faciès subvolcanique, les amphiboles, qui remplacent partiellement les clinopyroxènes du faciès volcanique, constituent des cristaux de composition chimique très complexe, caractérisés par la présence d'un groupement hydroxyde OH. La hornblende est l'un des plus importants représentants de cette famille (OH)2Ca2(Mg,Fe)4AI2Si7022.

La biotite, ou mica noir, appartenant à la famille des phyllosilicates, est aussi caractérisée par la présence du groupement OH : (OH)2KAl(Mg.Fe)3Si3O10; elle remplace dans le faciès subvolcanique la leucite et l'olivine du faciès volcanique.

Enfin, il faut signaler qu'en présence de gaz et à pression élevée, la pigeonite ne peut se former. A sa place apparaissent l'augite et l'hypersthène.

2°  Les produits pyroclastiques

On désigne par ce terme tout le matériel brisé émis par les éruptions à caractère explosif. Selon la nature et la grosseur des fragments, on distingue différents types de produits pyroclastiques.

—  Les cendres, improprement appelées ainsi, sont le matériel  le  plus fin,  constitué de petites esquilles de verre volcanique frais, auxquelles viennent s'ajouter des matériaux provenant de l'usure et de la pulvérisation des roches constituant les parois de la cheminée; parfois, pendant les éruptions de ce produit, des gouttes de pluie englobent des particules de cendre, les cimentent et forment ainsi de petits globules, que l'on appelle des pisolithes.

—  Les sables diffèrent des cendres uniquement par les dimensions de leurs particules; les cristaux isolés sont fréquents.

—  Les lapilli sont de petits fragments de taille comprise entre 0,2 et 2 cm de diamètre.

—  Les scories sont des fragments bulleux de lave relativement fluide refroidie à l'air pendant l'éruption.

—  Les ponces sont des fragments bulleux de lave si légers qu'ils peuvent flotter.

—  Les blocs sont des fragments de roches plus gros que les lapilli, arrachés aux parois de la cheminée.

—  Les bombes sont des débris de lave qui pendant leur vol dans l'air acquièrent, par leurs mouvements de rotation, des formes caractéristiques. Si le magma est assez fluide, des bombes en fuseau ou rubanées se forment. Si au moment de la chute elles sont encore visqueuses, elles se déforment, s'incurvent et s'écrasent. Souvent elles contiennent un noyau de matière étrangère.  Si le magma est très visqueux, des bombes en croûte de pain ou des bombes explosives prennent naissance. Les premières se forment lorsque l'on a un noyau encore visqueux, qui gonfle, prend un aspect ponceux et provoque dans la croûte presque solide de nombreuses fissures lui conférant l'aspect d'une croûte de pain. Dans les secondes, au contraire, la croûte de la bombe étant déjà solidifiée, lorsque le noyau se gonfle, les fragments anguleux de la croûte sont éjectés; il reste ainsi un noyau en forme de bombe en croûte de pain polygonale.  Les gouttes ou billes de lave pédonculées peuvent aussi être considérées comme de très petites bombes de lave très fluide. Pendant la chute, les filaments se détachent des billes et, transportés par le vent, s'accumulent pour former les cheveux de Pelé (laquelle était la déesse du Feu pour les Hawaïens).

Les tufs résultent de l'accumulation de matériaux incohérents cimentés par des circulations d'eau. En fonction du matériel qui les constitue, on distingue : les tufs cinéritiques, les tufs ponceux et les tufs bréchiques.

Ils sont généralement stratifiés; cependant, il faut également signaler les tufs chaotiques et les tufs soudés.

Les premiers sont formés par des matériaux cimentés, de nature et de dimensions très variées, sans aucune stratification. Les seconds prennent naissance lorsque les esquilles vitreuses sont encore suffisamment plastiques au moment du dépôt pour se souder les unes aux autres, ce qui ne peut avoir lieu qu'à une température encore relativement élevée. On aboutit ainsi à des bancs de scories soudées

et à des dépôts constitués par des cendres et des particules de lave.

Les ignimbrites sont aussi des couches très étendues de tufs soudés, déposés par des nuées ardentes émises pendant les éruptions fissurales de magmas acides très visqueux. Les parties centrales de ces dépôts sont facilement confondues avec des coulées de laves; elles en diffèrent toutefois : vers le haut, elles passent progressivement à des cinérites peu ou non soudées.

Bombe volcanique en "croûte de pain".  Puy de Lemptégy, Auvergne

3°  Les produits volcaniques sous-marin

La lave fluide qui s'épanche vers le fond de la mer est brusquement refroidie par l'eau et se désagrège en formant des amas de fragments vitreux, que l'on appelle hyaloclastites.  La lave, protégée par ces couches superficielles, forme un peu plus profondément des coulées compactes qui, par suite du refroidissement, acquièrent une structure prismée. Les coulées, entraînant de manière irrégulière la couche hyaloclastique sus-jacente, provoquent ainsi des fractures dans lesquelles pénètre la lave sous-jacente liquide; celle-ci forme ainsi des dykes. Au contact des hyaloclastites imbibées d'eau, ces intrusions se recouvrent aussi d'une couche vitreuse qui est, à son tour, partiellement désagrégée. Près de la surface de la coulée, par suite du brusque refroidissement, des amas de lave arrondis et recouverts d'une enveloppe vitreuse se forment fréquemment. Ils sont caractérisés par une structure interne rayonnante dont le refroidissement est responsable. En raison de leur forme, ils prennent le nom de pillowlavas, ou laves en oreiller.

Les hyaloclastites sont souvent remaniées par des courants sous-marins et par des mouvements de convexion dus au réchauffement de l'eau lors de l'éruption. Les hyaloclastites remaniées ne doivent pas être confondues avec les tuffites. Celles-ci sont, au contraire, constituées par du matériel pyroclastique subaérien, soit tombé dans l'eau, soit, plus fréquemment, érodé et transporté du continent vers la mer ou dans les lacs où il se mélange avec les matériaux sédimentaires.

d) Morphologie et structure des volcans

La morphologie et la structure des édifices volcaniques sont déterminées par des types d'éruptions qui dépendent de la nature des magmas, et en particulier de leur viscosité. D'autres facteurs très importants, comme l'état tectonique de la croûte terrestre, la stratigraphie, la topographie et le milieu (continental ou marin), interviennent de manière non négligeable. Le nombre de ces facteurs est à la base de la diversité des édifices volcaniques. Ainsi, chaque grand volcan présente des caractères qui lui sont propres, en raison non seulement des caractères cités ci-dessus, mais également de leur variation dans le temps. Chaque volcan résulte de l'histoire des éruptions qui l'ont construit avec les matériaux laviques ou pyroclastiques, ainsi que de l'évolution du milieu dans lequel il s'est agrandi.

Une systématique rigide des volcans est donc extrêmement difficile et subjective, car elle dépend du choix des caractères considérés comme les plus importants, tels que : la forme de la voie d'ascension de la lave (faille ou cheminée), la nature des produits (laves ou pyroclastites), le milieu (subaérien, sous-marin, sublacustre, périglaciaire), etc. Dans le cas des grands volcans, on constate souvent un changement de ces facteurs avec le temps; c'est pourquoi l'édifice qui en résulte est très complexe. Malgré ces difficultés s'opposant à une classification systématique des volcans on peut distinguer, à côté des types complexes, des prototypes de volcans simples.

Représentation schématique de divers types d'édifices volcaniques.  Volcan en bouclier (en haut), Stratovolcans (au centre), Volcan de Scories (en bas à gauche), Dôme endogène (en bas à droite).

1°  Les plateaux basaltiques

Les plateaux basaltiques sont des « volcans tabulaires » dus à des effusions successives de magmas basaltiques, très fluides, le long de fractures ou de failles très importantes. La structure de tels volcans est caractérisée par la superposition de puissantes couches basaltiques, traversées ça et là par de grands dykes. Le long de la faille même, on trouve de nombreux petits cônes de scories alignés, formés vers la fin de l'éruption, qui seront ensevelis successivement par les éruptions ultérieures.

Les plateaux basaltiques atteignent d'énormes dimensions. Au Deccan (Indes), où ils prennent le nom de trapps, ils couvrent environ 1000000 de km2, au Paranâ (Brésil) plus de 750000 km2; ils peuvent dépasser des épaisseurs de 3 000 m.

2°  Les volcans en bouclier

Les volcans en bouclier, construits par de nombreuses éruptions centrales, ont la forme d'un cône très aplati avec des cratères sommitaux à parois presque verticales que l'on appelle pit craters, ou puys, lesquels sont parfois remplis par un lac de lave.

En fonction de leurs dimensions et de leurs structures, on distingue des volcans en bouclier de type islandais, qui sont les plus petits, et des volcans en bouclier de type hawaïen, dont les gigantesques dimensions sont dues à des éruptions le long des flancs du volcan par un système de fractures rayonnantes. Si les éruptions latérales se répètent, l'édifice volcanique s'élargit et la partie la plus haute devient ainsi presque plane.

Le plus grand volcan en bouclier actif est le Mauna Loa (Hawaii), dont le sommet se situe à 4 200 m d'altitude et la base à plus de 5500 m sous la mer.

Des volcans moins importants, formés par des magmas fluides pendant une seule éruption, sont constitués par un cône et une seule coulée de lave. La forme de cette dernière et sa longueur ne dépendent pas uniquement de la quantité de lave émise, mais aussi et surtout de la configuration topographique.

3°  Les stratovolcans

Les stratovolcans sont constitués par la superposition de strates pyroclastiques et de coulées de laves. La forme classique est conique avec des flancs convexes et, au sommet, un cratère en forme d'entonnoir.

En fonction de l'importance relative des bancs pyro­clastiques et des coulées, on peut distinguer : des strato­volcans à lave dominante, des stratovolcans où la quantité des deux produits est équivalente et des stratovolcans à matériel pyroclastique dominant. Les deux premiers types de volcans sont le résultat d'éruptions de magmas relativement fluides. Leur structure stratifiée périclinale est souvent compliquée par la présence de dykes couches localisés dans la partie centrale du volcan et par des dykes rayonnants. Le troisième type de stratovolcan, dû à des éruptions de magma très visqueux, est très fréquent. Souvent le cône est constitué essentiellement de couches de ponces, cendres et tufs chaotiques déposés par des nuées ardentes et des lahars, tandis que dans les cratères se forme un dôme parfois traversé par une aiguille solide.

Les stratovolcans les plus importants sont localisés dans les zones orogéniques autour du Pacifique, en Indonésie, etc. Les massifs du Mont-Doré et du Cantal, le Vésuve et le Stromboli sont des stratovolcans typiques tandis que l'Etna est un stratovolcan riche en coulées qui se rapproche des volcans en bouclier.

Chaîne des Puys en Auvergne

4°  Les couvertures ignimbritiques

Ces couvertures sont dues à des éruptions fissurales de magmas très visqueux. Le matériel qui les forme est émis sous forme de nuées ardentes débordantes. La structure interne des couches ignimbritiques, compacte dans les parties inférieures, plus poreuse vers le haut et les bordures, passe enfin progressivement à des tufs friables et stratifiés. La partie soudée, compacte, présente un débit grossièrement prismatique et irrégulier. Les fractures qui ont émis le matériel sont remplies par ce débit; elles sont toutefois invisibles car elles sont recouvertes par la couche ignimbritique.

Cependant, des dômes de lave formés dans ou sur la couverture lorsque le magma était déjà dégazé, soulignent la direction de la fissure.

D'énormes couches ignimbritiques engendrées par la superposition des produits de plusieurs éruptions linéaires recouvrent des surfaces très vastes, comme Taupo-Rotorua (26 000 km2) en Nouvelle-Zélande, et le lac Toba (25 000 km2) dans l'île de Sumatra.

5°  Les caldeiras et les effondrements volcano-tectoniques

Les caldeiras sont des zones topographiquement déprimées, de forme subcirculaire, créées par l'effondrement d'une partie de l'édifice volcanique à la suite d'éruptions ayant vidé la cheminée ainsi que, parfois, également les parties les plus hautes du réservoir magmatique. Si les effondrements postéruptifs se succèdent, il en résulte des caldeiras plus complexes avec des contours festonnés, comme celle des champs Phlégréens près de Naples. Dans de nombreux cas, l'activité volcanique continue après la formation de la caldeira et se manifeste par l'installation dans celle-ci d'un certain nombre de petits cônes.  C'est le cas des champs Phlégréens.  Un autre exemple fameux étant la caldeira du Tengger (Java), où l'on compte sept petits volcans.

Des caldeiras semblables, mais de dimensions plus grandes et de contours polygonaux, correspondent à des effondrements volcano-tectoniques qui se forment lors des grandes éruptions ignimbritiques le long des fractures.  Le lac Toba, précédemment cité, en est un exemple : son diamètre maximal atteint presque 90 km.

6°  Les horsts volcano-tectoniques

Si une masse magmatique s'insère à une profondeur de quelques kilomètres dans des roches de poids spécifique plus élevé, elle exerce une poussée d'Archimède suffisante pour fracturer le toit du bassin magmatique. Les lambeaux de roche ainsi formés sont ensuite soulevés à différents niveaux; on les appelle aussi des horsts volcano-tectoniques. Souvent, le long des fractures et des failles qui délimitent les différents panneaux ou lambeaux, se manifestent des éruptions volcaniques qui construisent de petits volcans. Un exemple classique est celui du horst de l'île d'Ischia.

7°  Les volcans composites

Dans de nombreux volcans, l'axe éruptif se déplace, latéralement, provoquant ainsi la formation de différents cônes qui se recoupent. Des volcans très complexes prennent ainsi naissance : on les qualifie de composites.

L'Etna est un exemple de volcan composite, formé par différents appareils volcaniques ensevelis sous les projections plus récentes. A la base de l'Etna, il y a des basaltes sous-marins sur lesquels se forment des stratovolcans, parmi lesquels le Calanna et le Trifôglietto avec sa vaste caldeira sommitale que l'on appelle Valle del Bove. L'ensemble a subi un soulèvement intense par à-coups, dû à la tectonique régionale. C'est sur le flanc occidental de la Valle del Bove que s'est formé l'Etna actuel en activité. Cette structure volcanique, déjà très complexe, a été encore compliquée par de nombreuses éruptions excentriques qui ont construit des petits volcans de scories avec d'importantes coulées de lave.

Le Vésuve est un autre exemple de volcan composite. Son activité a commencé par la formation de couches ignimbritiques et de dômes trachytiques sur lesquels s'est installé un grand stratovolcan : le Monte Somma; ensuite, la partie centrale du volcan s'est effondrée, formant ainsi la caldeira sommitale dans laquelle, à une époque historique, est apparu l'actuel volcan actif.

Les chaînes de volcans installés sur une même fracture sont assez fréquentes. Les alignements de volcans construits par différentes éruptions ne doivent pas être confondus avec les petits cônes qui se forment sur une seule fracture au cours d'une éruption fissurale. Un exemple caractéristique de volcans alignés est celui de la chaîne des Puys, en Auvergne.

8°  Les volcans sous-marins

Les hyaloclastites désignent les produits tabulaires d'émission sous-marine. On connaît aussi, spécialement dans l'océan Pacifique, des volcans à cône central, appelés sea mounds, dont les flancs sont peu inclinés (10 à 12°) et qui sont formés par des hyaloclastites. Si la couche d'eau est faible, de tels édifices peuvent rejoindre et dépasser le niveau de la mer : ils constituent ainsi des îles. Dans ce cas, le volcanisme prend un caractère subaérien, avec des scories et des fontaines de lave. Des exemples d'îles volcaniques sont l'île de Capelinhos (Açores), l'île de Surtsey (Islande) et l'île Ferdinandea (Sicile).

Différents types de volcans composites


Pour me contacter, me faire part de vos idées, me poser vos questions, me laisser vos remarques...

cliquez ici :

Luc Van Bellingen

 

 

 

                                                                     Retour vers le sommaire

Les roches magmatiques et leur composition chimique